Les glaciers d'hier à demain

Conférence Culture scientifique et technique, Recherche
le  1 août 2023Villar-d'Arêne - Jardin du Lautaret
Lever de Soleil sur le glacier Blanc
Lever de Soleil sur le glacier Blanc ©Thierry Maillet - PNE
De 16h à 18h. Par les chercheurs Emmanuel Thibert (INRAE), Bernard Francou (IRD) et Emmanuel Salim (UNIL). Qu’ils soient noirs, blancs, rocheux, longs... les glaciers tiennent une place primordiale dans l’équilibre de l’écosystème et dans l’imaginaire collectif.

Des glaciers fragilisés

Depuis la fin de la dernière grande glaciation et l'avènement de notre période interglaciaire, soit une douzaine de millénaires, les glaciers n'ont cessé de fluctuer entre environ 2000 m et 3000 m d'altitude. Tantôt plus cours que de nos jours, tantôt  plus longs. Ces va-et-vient ont pu laisser penser que les glaciers, comme le climat, répondaient à des cycles. Que leur recul actuel s'inscrit dans un de ces cycles. Mais les scientifiques démontrent au contraire que leur recul actuel est exceptionnel. Il est probable qu'il soit déjà trop tard pour inverser la tendance. Même si l'on réduit drastiquement nos émissions, la concentration en gaz à effet de serre continuerait d'augmenter et la plupart de nos glaciers disparaitraient de nos massifs d'ici la fin du siècle.

Dans le massif des Écrins, la perte annuelle de masse du glacier Blanc a été multipliée par 10 depuis le début du 20è siècle.

Grâce à des documents cartographiques et des mesures directes des changements de géométrie, de masse et de vitesse, on est capable de regracer l’évolution du climat de montagne. Les précipitations hivernales qui alimentent les glaciers ont peu évolué. La période du réchauffement estival s'allonge. La fonte des glaciers s'en trouve intensifiée. La réponse des glaciers en terme de longueur et de vitesse d’écoulement est un signal d'alerte. Sur notre territoire, le glacier Noir et le glacier rocheux du Laurichard sont surveillés.

Tourisme glaciaire de la dernière chance

Après la découverte de la Mer de Glace en 1741, de nombreux sites touristiques glaciaires ont vu le jour. Le glacier Blanc et de la Girose, dans le massif des Écrins, en sont de parfaites illustrations. Cependant, le retrait glaciaire a des conséquences sur cette activité de tourisme montagne. Au-delà des aspects techniques, les transformations des paysages glaciaires changent la manière dont ils sont perçus par les pratiquants de la montagne et les touristes. La médiatisation de leur retrait en fait des objets de médiation pour mieux comprendre les évolutions climatiques actuelles tout en augmentant leur attraction touristique, avant qu’ils ne disparaissent.

Que nous apprennent les recherches scientifiques actuelles sur l'avenir de nos vallées ?

 
Bernard Francou
Bernard Francou est l'auteur de nombreuses publications scientifiques et a collaboré avec le GIEC (Groupe des experts du climat). Il est actuellement directeur de recherche émérite de l'IRD (Institut de Recherche pour le Développement) et se consacre à la diffusion du changement climatique en montagne auprès du grand public. Pendant sa carrière il a longuement étudié la combe de Laurichard où il a initié l'étude du glacier rocheux. Dorénavant l'un des glaciers rocheux les plus suivis dans le monde. Il a également étudié dans les années 90, les glaciers andins tropicaux où, en coopération avec des institutions andines, il a construit un réseau d'étude des glaciers, dont le but est de documenter l'évolution du climat et la ressource en eau dans cette région du monde.
 
Emmanuel Salim
Emmanuel Salim a réalisé sa thèse de doctorat au laboratoire EDYTEM de l’Université Savoie-Mont-Blanc sur les questions des transformations du tourisme glaciaire alpin face aux conséquences du changement climatique. À la croisée des sciences humaines et de l’environnement, il s’intéresse aux questions d’adaptation au changement climatique, mais également à ses conséquences sur les perceptions et représentations de la haute montagne. Depuis 2022, il est enseignant-chercheur post-doctorant au centre interdisciplinaire de recherche sur la montagne et à l’institut de géographie et durabilité de l’Université de Lausanne. Outre le tourisme glaciaire, ses travaux s’intéressent à la transformation de la pratique amateur de l’alpinisme, aux modes d’adaptation des territoires touristiques de montagne et aux stratégies de réduction d’émission de gaz à effets de serre des opérateurs touristiques.
 
Emmanuel Thibert
Emmanuel Thibert travaille à l'INRAE. Il a débuté ses recherches au CNRS dans les années 90 sur la physique et la chimie de la glace pour interpréter en particulier les signaux enregistrés dans les carottes de glace prélevées en Antarctique et au Groenland. Il s’est ensuite intéressé aux fluctuations des glaciers et en particulier aux bilans de masse des glaciers en réponse au climat. Au début des années 2000, il a initié la série de mesure du bilan de masse du glacier Blanc avec le Parc national des Écrins. Il est en charge des mêmes mesures au glacier de Sarennes, dont les données remontent à 1949. Il assure aussi les relevés des vitesses de surface du glacier rocheux du Laurichard, initiées par Bernard Francou.
 
Publié le  19 avril 2023
Mis à jour le  21 avril 2023